Lutte de classe : Logement, plus ça change, moins ça change !

Lutte de classe : Logement, plus ça change, moins ça change !

Premier poste de dépenses des Français, le logement est le grand oublié de la campagne présidentielle alors qu’une crise sociale forte, liée à cette question, semble se préparer. Le logement est en train de disparaître du paysage politique avec la désignation du premier gouvernement Borne ! Lors du précédent quinquennat, il n’a eu droit qu’à un ministère délégué – occupé par Emmanuelle Wargon – mais il était associé encore à un portefeuille. Pour le premier gouvernement du second mandat d’Emmanuel Macron, ce ministère n’existera même plus !

Lors de cette dernière campagne électorale, la candidate Valérie Pécresse, comme son concurrent Xavier Bertrand, voulait redorer le blason du droit de propriété. Le candidat , Éric Zemmour voulait supprimer les quotas de HLM, et comme Marine Le Pen, réserver les logements sociaux aux Français. Pour sa part, et de manière éphémère, Arnaud Montebourg proposait que l’État rachète les logements vides ! « Il y a une sorte de défaitisme à répondre vraiment au sujet du logement », a lâché Emmanuelle Wargon, encore ministre déléguée, fin décembre sur Franceinfo.

Pour sa part, Emmanuel Macron, désormais réélu, considère que le mal logement n’est pas un problème. Il n’est en fait que le représentant des nantis et des bailleurs privés. Et pour cause, la politique du Président Macron a aggravé la crise du logement, la pire depuis 50 ans, conjuguant hausse des loyers, du foncier et des biens immobiliers.

Pour seuls exemples, on peut rappeler :

  • La baisse des APL et 10 milliards d’économie sur le dos des moins riches auquel s’ajoute le marasme de la CAF, contrainte à marche forcée de mettre en place de la réforme dite de la « contemporanéité » des APL. Aujourd’hui, des centaines de milliers d’allocataires ne perçoivent plus ou très irrégulièrement leurs allocations et de plus en plus de locataires se retrouvent en situation d’impayé ;
  • La suppression des aides à la pierre qui financent la réalisation de logement sociaux, alors que 2,2 millions de ménages attendent un HLM ;
  • Le record de recettes fiscales grâce à la cherté du logement et à l’inaction délibérée du gouvernement pour bloquer la spéculation immobilière et foncière, agents de la hausse des loyers et du surendettement des ménages.

Le logement : une dépense majeure dans le budget des ménages.

En 2018, 26,6 % de la dépense de consommation finale des ménages est allouée au service de logement. Il s’agit du premier poste de dépenses, loin devant la part consacrée à l’alimentation ou aux transports (respectivement 17,1 % et 14,3 %). La part des dépenses dédiées au logement a sensiblement augmenté depuis les années 1990, où elle était inférieure de 6,5 points à son niveau actuel (source INSEE).

Toujours en 2018, les ménages ont dépensé en moyenne 9 712 euros pour leur résidence principale et, pour ceux qui en ont une, 7 325 euros pour leur résidence secondaire. Chez les locataires, la consommation annuelle moyenne associée au service de logement (eau, gaz, etc) s’élève à 9 575 euros pour un logement du secteur privé contre 7 441 euros dans le parc social (source INSEE).

Pour cette même année, du coté des institutions, ce sont 7,8 % des dépenses de logement qui sont prises en charge par la collectivité via des aides (39,6 Md€). Celles‐ci bénéficient essentiellement au secteur locatif, à hauteur de 38 % pour le secteur social et 32 % pour le secteur libre (source INSEE).

Pour la plupart des propriétaires immobiliers, le patrimoine se limite à leur résidence principale : 58,7 % des ménages sont ainsi propriétaires du logement qu’ils occupent, seuls 17,9 % sont propriétaires d’un bien immobilier autre et environ 12% détiennent des biens immobiliers de rapport. Parmi ces derniers, la concentration est particulièrement forte : 10% des ménages possédant les patrimoines les plus importants en possèdent les deux tiers, et les 5% des plus gros patrimoines en détiennent près de la moitié (source BdF 2013)

Une politique visant à garantir les revenus des propriétaires.

Dans un tel contexte et même si nous ne connaissons pas encore les missions attribuées au gouvernement en matière de logement, le constat est que le candidat Macron a peu parlé du logement durant sa campagne. Mais le peu qu’il en a dit est particulièrement dangereux :

  • L’isolation thermique de 700 000 logements par an est annoncée comme le principal investissement public dans le secteur. Toutefois, faute d’un encadrement strict, les bailleurs vont d’autant plus pouvoir augmenter les loyers avec pour conséquences plus d’expulsions, plus de loyers chers et plus de mal logement.

  • L’extension de la garantie VISALE à d’autres publics que les salariés, notamment aux jeunes. VISALE est une garantie contre les impayés de 3 ans et les éventuelles dégradations. Elle est censée aider un candidat locataire à accéder plus facilement à un logement. Force est de remarquer qu’au fil des hausses de loyer depuis 40 ans, des garanties publiques et privées ont été créées, pour assurer la rente des bailleurs privés. Plus les loyers sont garantis, plus ils augmentent. L’extension de VISALE, sous des dehors « sympa » pour les « djeunes » n’est donc qu’une mesure inflationniste, si elle n’est pas complétée à une baisse générale des loyers !

  • Le « fichier des mauvais payeurs » : Une nouvelle fois, Macron, accède à une revendication phare des bailleurs privés et des agents immobiliers, dont l’objectif là encore est de réduire les risques produits par les loyers chers : un nouveau fichier ouvert aux professionnels. Cette mesure est particulièrement brutale car elle rendrait impossible l’accès à un autre logement des ménages fichés, les condamnant à vivre sans logement, à squatter ou à quitter le pays. Depuis 2012, ce sont 1,6 millions de convocations au tribunal qui ont été délivrées pour impayés : soit 13 % des locataires !

  • La décentralisation des politiques du logement : En l’absence de lois encadrant efficacement les obligations des collectivités, notamment en matière de logement social, de contrôle des loyers et de la spéculation, cette mesure va impacter durement les quartiers populaires anciens ou HLM, et aggraver les discriminations urbaines. Les politiques locales du logement dans les communes riches c’est le refus de produire des logements sociaux et d’encadrer des loyers, mais les politiques d’urbanisme créent partout de « l’épuration sociale », en zones tendue, chassant les ménages modestes toujours plus loin des centres et dans des conditions de logement dégradées. La dernière loi logement de Macron a été la loi SRU. Elle a également renforcé la marchandisation des logements sociaux dans les opérations gérées par l’ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine).

  • Un objectif de 100 000 logements sociaux par an : Après la suppression des aides d’État à la construction de logements sociaux, Macron baisse les objectifs de nouveaux HLM, et pour cause il est passé de 90 000 nouveaux logements sociaux en 2018 à moins de 60 000 en 2021…

Face aux non-dits du macronisme.

Nous ne pouvons que constater que le peu de mesures annoncées dans le programme logement de Macron est dangereux. Mais ce qu’il n’a pas dit l’est encore plus, comme il l’a prouvé lors de son 1er mandat ! Cette fois, il y a la menace de privatisation des HLM, l’accélération des expulsions, une dérégulation complète des loyers et des baux, de nouvelles baisses des APL avec la fusions des aides sociales. Bref, encore plus de cadeaux pour les riches, les spéculateurs, et les groupes financiers, encore plus de criminalisation des squatters. C’est la hausse des expulsions, du nombre de sans abris de mal logés et des fins de mois toujours plus dures pour les locataires !

Les organisations qui agissent sur la question du logent se sont regroupées dans une « PLATEFORME LOGEMENT POUR TOU.TES » 1. Les principales revendications qu’elles portent peuvent être résumé ainsi :

  • Il faut interdire la hausse de loyers après des travaux d’isolation, baisser les loyers des passoires thermiques du montant du surcoût de dépense énergie du locataire, loyer des passoires thermiques E et G à 0 €, comme les logements insalubres.

  • Au lieu de garantir des loyers chers, il faut les baisser, tous et partout et relever les APL. C’est la meilleure garantie contre les impayés, et la plus efficaces pour redonner du pouvoir d’achat aux classes populaires.

  • Il faut un service public du logement pour contrôler et sanctionner la fraude aux rapports locatifs massive chez les bailleurs, (encadrement des loyers, gel des loyers à la relocation, surévaluation de la surface, non respect des normes de décence, des règles Airbnb&Co, des congés frauduleux), et l’aide fiscale à l’investissement locatif…

  • Il faut renforcer le contrôle des politiques sociales du logement et la protection des droits des sans logis, des mal logés et des locataires ; Passer de 25 à 30% de HLM dans chaque commune tendue ; Cesser les démolitions HLM en réhabilitant pour et avec les habitants.

  • Il faut 300 000 HLM par an, à bas loyer, pour répondre aux 2,2 millions de demandes HLM. Il faut des mesures d’urgence : Arrêt des expulsions sans relogement et de la répression des sans-abri et des squatters, interdiction des hausses et coupures d’énergie et d’eau, respect de la loi DALO et du droit à l’hébergement inconditionnel, réquisition des biens vacants de grands propriétaires, hausse de la taxe logements vacants, blocage des locations courte durée en zone tendue.

Nous soutenons sans ambiguïté le combat contre les projets du macronisme qui menacent les droits des locataires, des mal logés et des sans logis, ainsi que le logement social et le climat, tous sacrifiés sur l’autel du profit et de la rente !

1 AFVS, AITEC, ALDA APPUI, ATMF, ATTAC FRANCE, BAGAGÉRUE, CGT, CNAFAL, CONSTRUIRE ! CONV. NAT. SERVICES PUBLICS, CNL, COPAF, CRLDHT, CSP75, DAL, DIEL, Droit Devant, FASTI, Femmes Égalités, FLC ADEIC FSU, FUIQP, MRAP, PAS SANS NOUS, SAF, SYND. UNIFIÉ BÂTIMENT RP CNT-F, UNION SYNDICALE SOLIDAIRES, SMG, SNPES PJJ FSU, STOP PRÉCARITÉ, Syndicat Magistrature, United Migrants, UTOPIA 56 …