Antifascisme : Saint-Brévin, les fascistes guidés par les forces de l’ordre.
Les fascistes ont de nouveau organisé, autour du slogan : « A Callac, on a gagné, à Saint-Brévin, on va gagner », ce samedi 29 avril 2023, une manifestation dans cette petite station balnéaire de Loire Atlantique. Mais elle intervient dans un contexte particulier. La maison du maire de Saint-Brévin a été incendiée dans la nuit du mercredi 22 mars 2023. Cet incendie criminel s’est inscrit dans la stratégie de la terreur inaugurée à Callac, commune des Côtes d’Armor, où les partisans de Zemmour ont mené une campagne d’intimidation pour faire échouer un projet d’accueil de familles de réfugiés.
Le 22 mars 2023, nous pouvons l’affirmer malgré l’enquête de routine toujours en cours, des fascistes ont incendié les deux voitures du Maire, Yannick Morez, pour intimider le Conseil municipal et la population de la ville. Le brasier s’est ensuite propagé à la maison. Le feu a pu être maîtrisé et les dégâts circonscrit par l’intervention des pompiers. Mais cet acte terroriste pouvait tuer le Maire à une heure où le Maire et sa famille dormaient. Heureusement trois salariés d’Airbus qui rentraient du travail ont pu les alerter. Cet attentat contre des personnes a déclenché une grande émotion localement.
Le Maire de Saint-Brévin est un « modéré » élu sous l’étiquette Renaissance. Pourtant cet acte terroriste n’a pas semblé émouvoir le Ministre Darmanin. Lui qui a pris l’habitude de qualifier de terrorisme des actes qui ne relèvent pas de cela, n’a pas appelé à combattre la terreur fasciste. « Le parquet de Saint-Nazaire a ouvert une enquête préliminaire pour destruction volontaire par incendie sur personne dépositaire de l’autorité publique, et les gendarmes enquêtent ». C’est tout à ce jour. La routine quoi ! Une enquête qui semble s’enliser !
Les fascistes tolérés, protégés et même guidés par les forces de l’ordre dans Saint-Brévin
Comme si de rien n’était, l’État a autorisé la tenue d’une nouvelle manifestation fasciste à Saint-Brévin le 29 avril 2023, alors que les auteurs de l’incendie criminel ont à l’évidence agit dans le cadre et la logique d’intimidation qui guide cette campagne de l’extrême droite. Ils étaient probablement présents lors de cette manifestation. Plus que cela, plusieurs militants et militantes antifascistes ont vu des flics guider des fascistes pour leur permettre d’arriver au lieu de rassemblement.
Ouest-France a aussi décrit comment « vers 15 h, vêtus de noir, dont certains cagoulés, une centaine d’autre manifestants d’extrême droite rejoignent discrètement, les autres participants à la manifestation autorisée, sur le parvis de la mairie, tandis que leurs opposants sont toujours bloqués par les forces de l’ordre ». La photo jointe à cet article montre effectivement ce groupe de fasciste guidé par les flics pour parvenir sans encombre au rassemblement.
La CGT, la FSU et Solidaires 44 soutenaient la contre-manifestation antifasciste. Dans leur communiqué ils ont écrit : « En conséquence, nos organisations appellent à soutenir la mairie de Saint-Brévin et les collectifs pour le déménagement du CADA, en participant à l’initiative symbolique du collectif des brévinois attentifs et solidaires, samedi 29 avril, à 11 h, devant le futur CADA, allée des Pierres Couchées, ainsi qu’à participer à une contre-manifestation antifasciste le même jour à 13H00 place du marché à Saint-Brévin ». De fait de nombreux militantes et militants CGT et Solidaires étaient présents.
Mais contrairement aux fascistes, lors de leur arrivée dans la commune, les syndicalistes et antifascistes ont subi contrôles d’identité et fouilles de véhicules en arrivant dans la commune. Puis, quasiment en permanence, elles et ils ont été harcelés par les forces de l’ordre, gazés, chargés, alors que les fascistes pouvaient en toute tranquillité débiter leurs horreurs racistes. C’est ainsi que les panneaux portés lors du rassemblement affirmaient « Organisons la remigration des clandestins, délinquants et criminels étrangers ».
Au regard de la loi de 1881, toujours en vigueur, l’injure raciste est constitué par « toute expression outrageante, terme de mépris ou invective adressé à une personne ou à un groupe à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». Au regard de cette définition légale, accuser les sans-papiers d’être délinquants et criminels est donc du racisme. Cela ne relève pas de la liberté d’expression mais d’un délit. Les propos tenus par les fascistes à Saint-Brévin constituent donc des injures racistes susceptibles d’être punis par la loi.
Et c’est l’expression de ce racisme débridé que la préfecture a autorisée, alors que cette contestation a déjà créé un trouble à l’ordre public, quand elle porte une logique de violences et d’intimidation contre celles et ceux qui s’opposent à leurs projets, concrétisée par l’incendie des véhicules et de la maison du Maire de la commune, quand elle est ainsi intimement liée au terrorisme d’extrême droite. C’est cette expression que les forces de l’ordre ont protégés ce 29 avril dans le rues de Saint-Brévin, et même facilité en guidant les nervis fasciste dans les rues de Saint-Brévin.
Les racines de la tolérance au fascisme
Comment comprendre cette attitude du pouvoir ? Car la montée de l’extrême droite, que Macron laisse prospérer, pourrait sembler constituer une menace pour l’ordre capitaliste. Mais rappelons-nous ce qu’écrivait notre camarade Daniel Guérin dans son livre FASCISME ET GRAND CAPITAL édité en 1936 : « le fascisme consiste en l’instauration d’un État fort destiné à prolonger artificiellement le régime économique basé sur la propriété privée des moyens de production et sur le profit. Suivant la formule imagée de Radek, la dictature fasciste, « ce sont des cercles de fer avec lesquels la bourgeoisie essaie de consolider le tonneau défoncé du capitalisme » ».
Visionnaire, Daniel Guérin expliquait qu’« il n’est pas absolument exclu que les mêmes causes profondes qui ont poussé les magnats italiens et allemands à financer les bandes fascistes, puis à porter au pouvoir le fascisme, reproduisent ailleurs les mêmes effets ». Cette réalité est visible aujourd’hui, quand Vincent Bolloré, industriel, homme d’affaires, propriétaire de médias et milliardaire français, a choisi de soutenir Éric Zemmour. Non seulement ce soutien s’inscrit dans la radicalisation de pans entiers de la bourgeoisie, mais il a accouché de cette horreur politique qu’est le parti Reconquête, à la manœuvre dans cette mobilisation raciste.
Pour Daniel Guérin, la leçon des drames italien et allemand est que le fascisme n’a aucun caractère de fatalité. « Le socialisme eût pu et dû l’exorciser s’il s’était arraché à son état de paralysie et d’impuissance ; s’il avait gagné de vitesse son adversaire ; s’il avait conquis, ou pour le moins neutralisé, avant lui, les classes moyennes paupérisées ; s’il s’était emparé, avant le fascisme, du pouvoir – non pour prolonger tant bien que mal le système capitaliste (comme l’ont fait trop de gouvernements portés au pouvoir par la classe ouvrière), mais pour mettre hors d’état de nuire les bailleurs de fonds du fascisme (magnats de l’industrie lourde et grands propriétaires fonciers) : en un mot, s’il avait procédé à la socialisation des industries–clés et à la confiscation des grands domaines. En conclusion, l’antifascisme est illusoire et fragile, qui se borne à la défensive et ne vise pas à abattre le capitalisme lui–même ».
« Mais telle n’est pas l’optique des « fronts populaires ». Leurs bonimenteurs se cramponnent à la planche pourrie de la démocratie bourgeoise et font risette aux groupes capitalistes les « moins réactionnaires », pour se préserver des « plus réactionnaires ». Ils attendent leur salut d’un Giolitti ou d’un Brüning qui, finalement, les livrera, pieds et poings liés, à un Mussolini ou à un Hitler. S’ils ont le goût du suicide, c’est leur affaire ».
Bouée de secours du capitalisme, le fascisme est le plus grand ennemi du prolétariat. La crise du capitalisme, de plus en plus incontrôlable, met aujourd’hui le fascisme en situation de supplétif de l’ordre capitaliste. C’est la seule façon de comprendre la tolérance du gouvernement avec la violence fasciste, quand il ne tolère rien s’apparentant à un projet de transformation sociale.
Le combat antifasciste est incontournable pour notre classe sociale. Ce combat se mène dans la rue, car laisser le fascisme s’en emparer serait prendre un risque considérable. Mais ne nous y trompons pas. Cela ne suffira jamais pour affaiblir le fascisme. Seul le combat social permettra, en faisant renaître un espoir, d’assécher la désespérance sociale dont se repaît le fascisme. Le mouvement contre la réforme des retraites a remis le combat social au cœur de l’actualité. Si cela s’ancre dans la durée, le fascisme deviendra inaudible. Là encore, cela indique que la participation à la lutte des classes doit être au centre de l’activité des militantes et des militants révolutionnaires.