Politique : L’extrême droite aux portes du pouvoir.
Nous nous réveillons avec une gueule de bois face à la présence de l’extrême-droite au second tour de la présidentielle. Cela nous rappelle la nécessité d’un combat antifasciste conséquent. Lutter contre les idées fascistes et organiser des manifestations de rue restera nécessaire mais jamais suffisant. C’est au sein du combat social, dans les associations de lutte et les syndicats, qu’il sera possible de faire reculer la désespérance sociale, ce terreau du fascisme. Toutefois face au danger grave pour tous les travailleurs et travailleuses de ce pays que représente la possibilité de l’élection de Le Pen nous ne pouvons ignorer la question électorale.
Macron a mené une politique antisociale comme jamais auparavant au sein de la cinquième république. L’idée de voter pour lui au second tour révulse de nombreuses militantes et militants. Malgré cela renvoyer dos à dos Macron et Le Pen, qui sont effectivement deux facettes d’une politique au service du capitalisme, n’est pas satisfaisant. Car le programme de Le Pen n’est pas comparable avec le programme « simplement » ultra-libéral de Macron.
Aux antipodes de sa campagne, centrée sur le pouvoir d’achat et visant à créer une image « assagie », le programme de Le Pen est brutal, xénophobe et autoritaire. Les propositions concrètes que cette dernière se propose de mettre en œuvre vont fracturer un peu plus les classes populaires, écraser les plus faibles, exacerber les discriminations, favoriser l’appropriation des richesses par le capital, tenter d’éradiquer le mouvement social, laisser les forces de police agir avec toute la violence possible…
Plus concrètement rappelons ici quelques unes des propositions phares de son programme :
- La présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre va enclencher un cycle de violences policières débridées ;
- Les mesures préconisées de lutte contre le terrorisme visent à mettre en place un arbitraire administratif total et ouvrent la porte au retour d’un délit d’opinion ;
- La priorité nationale, la suppression du « droit au sol », la suppression du regroupement familial, le droit d’asile rendu quasiment impossible, l’impossibilité de régulariser des sans-papier… tout cela aurait des conséquences dévastatrices pour des millions de personnes ;
Sa prétention à être la « présidente de la paix civile », de « l’unité nationale » devrait ressembler à celle de Poutine, son modèle et soutien, élu lui aussi « démocratiquement ». A coup de répression policière, d’assassinat de contestataires, d’écrasement de la liberté de la presse, de suppression de la liberté de s’associer, de s’exprimer, de manifester … il a lui aussi obtenu un genre de paix civile au sein d’un pays ravagé par la pauvreté et où les milliardaires prospèrent. Non, nous ne pouvons pas nous résigner à laisser Le Pen être élue. Ni cette fois-ci, ni la fois suivante.
C’est pourquoi nous appelons évidemment à ne pas voter Le Pen au second tour. Toutefois, dans cette situation où il n’y a pas de bonne solution, nous continuons à refuser d’opposer celles et ceux qui penseraient nécessaire de voter et celles et ceux qui refuseraient de le faire.
Et quelque soit le résultat de la Présidentielle, et d’ailleurs des législatives qui vont suivre, la situation politique actuelle nous rappelle que le combat antifasciste n’est pas anecdotique. Que des travailleuses et des travailleurs aient été conduits à se dévoyer en votant Le Pen et son projet fasciste renvoie à la responsabilité des partis se disant « de gauche ». Car nous ne pouvons oublier qu’ils ont gouverné le pays en alternance avec la droite, mais toujours dans la même logique de favoriser l’appropriation des richesses par les capitalistes, d’affaiblir les services publiques, le droit du travail et les libertés individuelles.
D’ailleurs l’écroulement du PS à ce premier tour, que nous espérons définitif, est une des bonnes nouvelles de cette élection, un obstacle levé pour reconstruire une autre « gauche ».
Pour endiguer réellement le fascisme qui monte, nous avons besoin de refonder un vaste mouvement anticapitaliste fonctionnant sur ses deux jambes. D’un coté tout un ensemble d’associations et de syndicats s’inscrivant dans une réelle convergence des luttes pour reconstruire une solidarité de classe. De l’autre une convergence des forces anticapitalistes, construisant leurs actions au sein des classes populaires dans leurs diversités, reprenant à son compte les préoccupations économiques de ces dernières et proposant un projet porteur d’espoir pour nous toutes et tous.
Si une telle dynamique ne se concrétisait pas dans les mois et les années à venir, si nous laissons Macron mettre en œuvre sa politique, l’arrivée de l’extrême-droite au pouvoir qui, nous l’espérons aujourd’hui, n’est encore qu’un risque, deviendra une quasi-certitude la prochaine fois.