Politique : Présidentielles, l’angoisse !

Politique : Présidentielles, l’angoisse !

Alors que la question sociale émerge timidement dans la campagne présidentielle, que les soudages semblent prévoir un second tour Macron-Le Pen, que Macron affirme sans détour son programme antisocial, Le Pen veut s’affirmer comme la championne du social et prétend défendre les « petits » contre les « gros ». En réalité, sauf surprise improbable de Mélenchon au second tour, ce sera deux versions d’une politique au service des dominants qui vont s’affronter le 24 avril.

La trajectoire que suit la France, à l’instar de nombreux autres pays européens, reste durablement marquée par les remises en cause des outils de solidarité collective – sécurité sociale, droit du travail, services publics ; par le recul des libertés publiques aggravé par la gestion désastreuse de la pandémie ; et par la banalisation des discriminations racistes et la persistance des inégalités hommes-femmes.

Deux millions de personnes touchent moins de 700 euros par mois. Plus de deux cent mille d’entre elles et eux vivent dans des logements indignes ou à la rue. La France est l’un des pays des plus riches au monde, mais ses gouvernements successifs n’ont nullement éradiqué la misère qui n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Dans cette montée de la misère, la casse des outils de protections collectives depuis les présidences Sarkozy, puis Hollande a joué et joue encore un rôle important.

C’est un véritable processus de « fascisation » des esprits, porté par l’ensemble du personnel politique, de la majorité macroniste, en passant par la gauche parlementariste et jusqu’à la droite classique, auquel nous nous heurtons. Le mouvement social peine à s’opposer à cet avilissement de la société.

Les programmes des deux finalistes putatifs.

Les annonces de Macron montrent que, s’il est élu, il va poursuivre la même politique en ne se gênant pas pour aller encore plus loin. C’est ainsi le cas avec le projet de travail obligatoire imposé aux allocataires du RSA ou l’augmentation à 65 ans de l’âge légal de départ à la retraite, alors que de nombreux travailleurs et travailleuses sont jetées au chômage bien avant 60 ans. La destruction des services publics va continuer elle aussi. Quant aux classes privilégiées elles bénéficieront de nouveaux cadeaux, par exemple la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ou la baisse des droits de succession … En parallèle nous verrons se renforcer l’appareil sécuritaire et la répression contre les travailleurs et les travailleuses immigrées.

En ce qui concerne Le Pen, comme le font tous les apprentis dictateurs, elle prétend vouloir défendre les « petits » contre les « gros ». Les fascismes se sont toujours construit sur la critique de la finance, des inégalités et de l’individualisme économique. Ils prétendent vouloir dépasser la division entre les classes sociales pour construire une unité nationale au sein d’un état autoritaire, et en s’attaquant fortement aux organisations ouvrières.

Une lecture attentive du programme de Le Pen démontre qu’elle s’inscrit bien dans cette perspective. Si l’on prend la question salariale, elle propose un allègement des cotisations patronales pour les entreprises qui augmenteraient les salaires. Pour les patrons, c’est une opération neutre. Pour les travailleuses et les travailleurs, un déséquilibre supplémentaire de la protection sociale qu’elles et ils paieront bien d’une manière ou d’une autre. Par ailleurs, elle ne défend plus, comme c’était le cas en 2017, la retraite à 60 ans, ni les 35 heures, ni le retrait de la loi Travail, ni le statut des fonctionnaires…

Enfin elle prétend financer les cadeaux qu’elle veut faire elle aussi aux classes sociales privilégiées – par exemple la suppression de la cotisation foncière des entreprises ou là encore des exonérations de droits de succession – en supprimant l’accès à certaines prestations sociales et à certains services publics aux étrangers. 16 milliards d’économie sur le dos de familles déjà largement précarisées.

Quant à l’urgence écologique, avec la crise climatique et l’effondrement de la biodiversité, elle est complètement éludée. Pour les deux finalistes prévus, il s’agit à l’évidence d’une question secondaire.

Un mouvement social tétanisé.

Les classes populaires partagent pourtant largement les objectifs portés par les multiples mobilisations sociales de ces dernières années : défense de l’emploi, augmentation des salaires, développement des services publics, lutte contre le dérèglement climatique … Ainsi, durant la campagne présidentielle, malgré toute l’énergie mise par les partis politiques de droite et d’extrême droite ainsi que par les médias pour imposer des thèmes identitaires, la thématique des salaires et du coût de la vie a réussi à s’imposer, tout comme celle du climat. Malheureusement aucun véritable projet politique collectif combinant « radicalité » et « unité ouvrière » n’est porté dans cette élection !

Une « gauche » irresponsable.

Pendant ce temps là, que fait la gauche ? Les camarades du PC s’investissent à corps perdu notamment dans la candidature Roussel. Pourquoi ? Pour peser sur les accords électoraux attendus pour les législatives et les élections suivantes. Les campagnes électorales des Verts et du PS poursuivent exactement les mêmes objectifs. Quant aux camarades de LFI, ils reprennent à leur compte la problématique du vote utile que nous avait seriné le PS. Il s’agit en fait de devenir dominants face aux autres organisations de gauche. Cela relève évidemment de la logique des institutions de la cinquième république. Mais au final ces manœuvres d’appareils sont aux antipodes des attentes du « peuple de gauche ».

Le NPA et LO mènent de leur coté des campagnes honorables, mais dont l’enjeu principal est la construction de leur organisation.

Dans ce contexte les élections présidentielles semblent être déjà bouclées avec un second tour désespérant Macron contre Le Pen. La surprise de Mélenchon au second tour apparaît bien improbable. L’arrivée au second tour de Le Pen, représentante de l’extrême-droite, c’est à dire du pire ennemi des travailleurs et des travailleuses, ne nous réjouit pas. Mais l’alternative Macron ne serait qu’un nouveau point d’appui à une politique en faveur de la bourgeoisie dominante.

Au final ce seraient deux versions d’une politique au service des dominants. Pour notre part, nous estimons que toute voix de notre camp social qui se portera sur l’un de ces représentants de la bourgeoisie, ne pourra l’être qu’à notre détriment. Pourtant, dans cette situation où il n’y a pas de bonne solution, nous continuons à refuser d’opposer celles et ceux qui penseraient nécessaire de voter et celles et ceux qui refuseraient de le faire.

Le combat pour « l’unité ouvrière » est au centre de la stratégie des membres de notre réseau. Ce combat trouve bien peu de place au sein de cette élection. Une fois celle-ci passée, nous rechercherons à agir avec tous ceux et celles qui sont déterminées à combattre cette société d’injustice sociale et de destruction du vivant.